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Je dis
: "Jésus n'était qu'un homme".
Que contient cette phrase de si fort pour provoquer chez
le catholique pratiquant le sentiment de colère
que l'on imagine, sans compter que par le passé
l'énonciation de celle-ci m'eusse valu, à
coup sûr, la peine capitale ?
Je pourrais
à l'envi décomposer le syntagme "Jésus
n'était qu'un homme" en phèmes
du côté du signifiant (plan de l'expression),
en sèmes et classèmes du côté
du signifié (plan du contenu) sans jamais pour
autant effleurer d'un cheveu l'origine de sa puissance,
de ce qui lui donne virulence et pouvoir.
Le fait
que je sache qu'au niveau de la forme de l'expression,
Jésus s'oppose à Josué,
Josua, etc.; que le mot hébreu yéchou'a
(délivrance) est enfoui dans celui de Jésus,
impliquant par là que son nom connote déjà
sa future fonction de sauveur, peut m'aider effectivement
à comprendre la signification de ce mot, mais en
aucun cas sa force.
La réponse à
votre question, me dira un sémanticien, est à
rechercher du côté de la forme du contenu.
Au mot Jésus, tout catholique associe, entre
autres, l'idée (le sème) de "fils de
Dieu", or "Jésus n'était qu'un
homme" infirme cette idée, d'où sa
prévisible réaction d'indignation.
Une telle réponse laisserait à penser que
si un poète avait à prononcer "Le soleil
n'était qu'un glacier", il devrait aussitôt
craindre que s'abatte sur lui le courroux de son entourage
sous prétexte qu'à soleil ne peut être
associée que l'idée de "chaleur",
et que glacier infirme cette idée.
Une analyse
phémique ou sémique de "Jésus
n'était qu'un homme", ne me dit pas pourquoi
cette phrase a le pouvoir de susciter une réaction
aussi vive, pouvoir que n'a pas "Le soleil n'était
qu'un glacier". Autrement dit, celle-là
possède quelque chose en plus que ne renferme
pas celle-ci, et qui échappe complètement
à la grille d'une analyse sémantique classique.
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Directeur
scientifique |
Henri
QUERE |
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Rédaction |
J. FONTANILLE,
E. LANDOWSKI |
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Comité
de rédaction |
D.
BERTRAND, |
J.
COURTES, |
P.
FABRI, |
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FLOCH, |
M.
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H.
QUERE, |
F.
THURLEMANN, |
Cl.
ZILBERBERG |
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Composé
et imprimé à la Faculté des Lettres et
des Sciences Humaines |
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